Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi a profité mercredi de la tribune de l'ONU à New York pour prononcer une diatribe contre l'Occident, lors d'un discours-fleuve où redites, improvisations et bizarreries ont été légion
|
Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, le 23 septembre 2009 à la tribune de l'Assemblée générale de l'ONU à New York . NEW YORK (AFP)
|
"Qui a dit que les talibans sont des ennemis? Oussama Ben Laden est-il un taliban? Non. Ceux qui ont attaqué le World Trade Center à New York étaient-ils talibans, étaient-ils afghans? Non", a-t-il martelé.
"Si les talibans veulent établir un Etat religieux, OK, comme le Vatican. Le Vatican constitue-t-il un danger pour nous? Non," a dit M. Kadhafi aux représentants des 192 Etats membres de l'ONU.
Il a aussi affirmé que les Arabes "ne ressentent aucune hostilité" envers les Juifs, leurs "cousins".
"C'est vous qui haïssez les Juifs et êtes antisémites. C'est vous les génocidaires responsables de l'Holocauste et des fours crématoires en Europe", a-t-il lancé aux dirigeants européens présents dans la salle.
Il a estimé que la solution à deux Etats pour résoudre le conflit israélo-palestinien n'était "pas pratique".
"Elle est même impossible et je vous prie de ne plus en parler", a-t-il dit, affirmant que la solution réside en un seul Etat démocratique pour les Juifs, les musulmans, les Palestiniens, les chrétiens et les autres, à l'exemple du Liban.
Pour sa première apparition en 40 ans de pouvoir, le bouillant colonel, qui a fait attendre l'auditoire pendant plus de cinq minutes avant de monter à la tribune, a parlé pendant une heure et 35 minutes alors que les orateurs avaient été priés de ne pas dépasser les 15 minutes par le président de l'Assemblée, Ali Triki, un ancien ministre... libyen.
Il est vrai que le prédécesseur de M. Kadhafi, l'Américain Barack Obama, avait lui aussi dépassé cette limite, parlant pendant 40 minutes.
Prié d'abréger à deux reprises, le "Guide" de la révolution libyenne a refusé, prenant justement prétexte du dépassement de temps de M. Obama.
Semblant parfois se perdre dans ses notes, inscrites sur des pages jaunes volantes, M. Kadhafi s'en est pris en particulier à la domination exercée sur le Conseil de sécurité par ses cinq membres permanents (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne et Russie) et à leur droit de veto.
"Le veto est contraire à la Charte de l'ONU, l'existence de membres permanents est contraire à la Charte", a-t-il lancé, brandissant le petit livre bleu contenant le texte fondateur des Nations unies et faisant mine de le déchirer.
Il a stigmatisé les grandes puissances, notamment les Etats-Unis, les accusant d'avoir déclenché de nombreux conflits depuis 1945 pour poursuivre leurs propres intérêts. Il a aussi souhaité que le siège de l'ONU soit réinstallé hors des Etats-Unis.
Il a affirmé que l'Afrique devrait recevoir 7.770 milliards de dollars de compensation pour avoir été colonisée par les Européens, sans préciser comment il était parvenu à ce montant.
"Les Africains vont réclamer cela et si vous ne le leur donnez pas ce montant de 7.770 milliards, les Africains iront là où vous avez pris ces milliards", a dit le colonel.
Son discours, au cours duquel il a évoqué aussi bien l'assassinat du président américain John Fitzgerald Kennedy que la guerre du Vietnam, les pirates somaliens ou la vaccination, est apparu très décousu, plein d'improvisations mais surtout de redites, sur le thème de l'injustice du monde.
A l'extérieur du bâtiment, protégé par des milliers de policiers, plusieurs centaines de militants de l'organisation "Nation de l'Islam" s'étaient rassemblés pour apporter leur soutien au colonel Kadhafi, avec des pancartes sur lesquelles était notamment inscrit: "Longue vie au roi de l'Afrique".